Du
lundi 10 au dimanche 16 juin 1918
POUSSIÈRE,
FUMÉE, RAFALES DE GAZ
Fernand
TIRFORT
Soldat
au 173ème Régiment d’Infanterie
Disparu
le 12 juin 1918 à Vignemont (Oise)
Fernand TIRFORT est né le 8 août 1895 à Tornac, de Louis et d’Emilie-Eugénie
née Martin. Il est cultivateur. Il a une petite taille : 1,54 m. Il est
d’abord ajourné de ce fait et pour « faiblesse » en 1914 puis en
1915. Mais en 1916 on a besoin de tout le monde, il est incorporé le 26 août
1916 dans le 52ème Régiment d’Infanterie. Passé au 157ème RI le 10 janvier
1917, puis au 173ème RI le 9 septembre 1917. Basé à Bastia, ce régiment est
surnommé « le régiment corse ».
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Général Von Hutier |
Dans
le cadre plus général de l'offensive du printemps, aussi nommée bataille du
Kaiser (Kaiserschlacht), ou offensive de Ludendorff, c’est une offensive
allemande de grande envergure visant à réunir les deux saillants de Compiègne,
suivie d'une contre-attaque française. Sous
la direction du général Von Hutier, l’engagement de l'artillerie est énorme,
30 batteries au kilomètre, avec une grande partie d'artillerie lourde. Les Allemands ont engagé, du 9 au 13 juin, 18 divisions pour gagner un territoire
d’une douzaine de kilomètres. Leurs pertes sont de 60 030 hommes hors de
combat, 97 avions abattus et 212 canons détruits. Le
12 juin, les Français ont retrouvé leurs positions. Ludendorff arrête l'action.
Historique
du 173e RI pour ce début juin 1918 :
« Embarquant
en chemin de fer le 4 juin à Pont-Saint-Vincent et à Ludres, il débarque le 5 à
Pont-Sainte-Maxence, puis, enlevé en camions le 6, il est le 7 à
Villers-sur-Coudun à la disposition de la IIIe armée. Il stationne le 8 dans
cette localité.
C'est
au milieu de la poussière, de la fumée, des rafales de gaz, que le régiment
alerté se porte en avant de Matz au secours des unités de la 125e division,
dominées, écrasées par la violence de l'attaque.
Le
Matz est franchi ; le régiment, comme sur la place d'exercice, se déploie au
milieu des blés sur le plateau de Margny-sur-Matz et marche vers Bourmont et
Bayencourt. L'ennemi à déjà occupé ces villages en forces. L'arrivée du
régiment sur ce plateau découvert est tôt signalée par l'aviation ennemie et
l'artillerie allemande l'arrose en tous sens. De notre côté, on voit à l'œil nu
l'infiltration de groupes allemands avec mitraillettes et mitrailleuses.
A
11 heures, un combat d'infanterie d'une violence inouïe s'engage ; les
mitrailleuses font rage des deux côtés. La poussée devient de plus en plus
forte. Le feu d'artillerie augmente d'intensité. Notre ligne demeure
inébranlable. Couchés, nos mitrailleurs et nos fusiliers font de la bonne besogne.
Cette résistance paraît surprendre le Boche qui hésite puis se terre.
Jusqu'à
19 heures, les bataillons tiendront là où ils ont reçu mission de tenir. Sur un
ordre du colonel commandant l'infanterie de la 125e division, le combat est
rompu. La défense est reportée sur la hauteur au sud de Matz et de Marquéglise,
dite « bois de la Montagne et de Marquéglise ». L'ennemi paraît essoufflé ; il
ne poursuit pas ; le mouvement des unités du 173e s'opère dans le plus grand
calme.
Au
matin, le 10 juin, les Allemands tentent de déboucher de Marquéglise. Mais,
pris sous le feu de nos mitrailleuses, ils refluent en désordre. Cinq fois ils
renouvellent, mais en vain, leur tentative. Leur effort se porte alors sur les
corps qui tiennent les positions à notre droite et à notre gauche.
A
15 heures, débordé aux ailes, presque encerclé, le 173e rompt le combat, se
reporte à un kilomètre en arrière et vient s'établir le long de la voie ferrée
: Antheuil - Villers-sur-Coudun, sa gauche au village d'Antheuil, sa droite à
proximité du lieu dit « Le Zoel ». C'est sur cette position que va se jouer la
dernière partie de cette offensive. C'est là que le 6e grenadiers de la Garde
viendra se heurter à ceux qui ont reçu pour mission de barrer la route de Compiègne.
Mais les joyeux « feldgrau », dans les poches desquels sera trouvé l'ordre que
leur avait donné leur empereur de coucher à Compiègne le 9 juin au soir, ne
passeront pas. Les pertes subies par le régiment sont importantes : il est
renforcé par un bataillon du 6e régiment d'infanterie.
A
la faveur des haies, des blés hauts et nombreux dans cette région, protégé par
le bois de la Montagne, l'ennemi tente, par infiltration, de déboucher de la
lisière sud du village de Vignemont ; mais il ne peut atteindre son but.
Le
11, à 14 heures, il essaye, protégé par un tir extrêmement violent d'artillerie
lourde et de mines, d'occuper la voie ferrée. Cette attaque en forces n'a aucun
succès. Les unités lancées à l'assaut se replient sous notre barrage, décimées
et poursuivies par nos tirs d'infanterie.
Les
12 et 13 juin, l'ennemi ne se livre à aucune attaque d'infanterie. Dans la nuit
du 13 au 14, à partir de 22 heures, le tir d'artillerie devient de plus en plus
nourri. Les obus à gaz tombent partout dans la région ; les routes sont
soumises à un tir d'interdiction très serré. Ce tir sera ininterrompu jusqu'à 3
heures, le 14. A 3 heures précises, les minens tombent en abondance ; des obus
éclairants et des obus fumigènes sont lancés par l'ennemi dont l'attaque se
déclenche. Les grenadiers du 6e régiment, protégés par un barrage roulant
intense qu'accompagne un tir très nourri de 150 et de 210, tentent d'aborder
nos avant-postes. Mais ils ne peuvent y parvenir. Les soldats du 173e, debout
ou à genoux sur la voie ferrée, couchent à terre les assaillants qui ont eu l'imprudence
de croire que toute force de résistance était épuisée chez nous.
Ce
fut la dernière des attaques menées sur ce front.
Ce
fut l'arrêt de la marche « nach Compiègne ».
Jusqu'au
5 juillet, le 173e R. I. tiendra sur ces positions qu'il créera, organisera et
renforcera ; aucune action ne sera menée de part ni d'autre ».
Fernand TIRFORT est
porté disparu le 12 juin 1918 à Vignemont (Oise), lors de ce combat. Mais le
jugement de 1920 officialisant son décès porte la date du 10 juin 1918. Il figure sur
le monument aux morts et sur le Livre d’Or d’Anduze.
En
1918, le 173e RI aura perdu 3 514 hommes, soit la valeur de son effectif.
-
Louis BERTHEZENE, le 23 octobre 1914 à Rehainvillers (Meurthe-et-Moselle), voir
semaine 4,
-
Paul CHAUDESAIGUES, le 29 mai 1916 à Esnes (Meuse), voir semaine 95.
Mais
Fernand Tirfort n’a pas pu les rencontrer, car il n’est arrivé dans ce régiment
qu’en septembre 1917.
A suivre…