RETOUR EN LORRAINE

66ème semaine

Du lundi 1er au dimanche 7 novembre 1915

RETOUR SUR LA BATAILLE DE LORRAINE

Louis-Camille Flouret, 240ème RI, 
mort le 25 août 1914 à Warcq, tué à l’ennemi


Notre voyage dans le temps nous permet un exceptionnel moment de répit, au milieu de cette descente aux enfers de la guerre de 14-18 : pendant 14 semaines, du 25 octobre 1915 au 8 février 1916,  aucun mort anduzien n’a dû être enregistré. Cela va nous permettre de compléter les notices concernant les malheureux jeunes gens victimes de cet atroce conflit. Le monument aux morts de la commune comporte 121 noms, mais nous avons vu que cela ne suffisait pas : deux autres documents portent d’autres noms, le livre d’or officiel de la commune et la stèle de l’église Saint-Etienne. Pendant quatorze semaines ce sera donc d’eux, ou de quelques autres encore, qu’il sera ici question.

Louis-Camille Flouret est né le 13 janvier 1884 à Florac. En 1914 il habite Anduze, ce qui lui permet d’être incorporé au 240ème régiment d’infanterie basé à Nîmes, comme la plupart des Anduziens.

Cette quatrième semaine du conflit aura été la plus meurtrière pour les Anduziens : huit tués dans les divers combats de défense sur les fronts de Lorraine ou des Vosges.

Du 15 au 19 août 1914, les armées françaises avaient entamé l'offensive en Lorraine, face aux VIe et VIIe armée allemandes. Le 20 août, devant Morhange, la IIe armée, face à des positions ennemies bien organisées et une artillerie puissante, a subi une lourde défaite en devant battre en retraite vers la Meurthe.

Le 240ème RI, qui compte nombre d’Anduziens, n’a pas participé aux terribles batailles du 22 août, le jour le plus meurtrier de la guerre : 27.000 morts… Il est resté en réserve dans son cantonnement à Origny (Meuse). A partir du 23 il fait mouvement vers le front.

Le 24 août il se trouve à Braquis et reçoit un ordre verbal du général commandant la 75ème division de se porter vers les bois voisins et d’attaquer l’ennemi « où on le trouvera ». Le régiment se met alors sur une seule colonne vers Saint-Maurice et avance sur la route traversant le bois d’Hermeville. Mais la lisière du bois et le village lui-même sont battus par de l’artillerie allemande établie sur des hauteurs. Plusieurs compagnies attaquent quand même, cherchant à prendre la ligne de chemin de fer Etain-Conflans occupée par l’ennemi. Un feu violent les accueille, elles sont clouées sur place et ne peuvent progresser « en raison du manque de soutien d’artillerie, dont on ne s’est jamais aperçu de l’intervention bien que quelques salves semblent avoir été tirées ». La nuit arrête le combat, chacun restant sur ses positions.


Le 25 août l’ordre arrive à 2 h 30 de continuer l’attaque au petit jour. A 3 h 30 le Lieutenant Colonel fait lever le bivouac et donne ses ordres de mouvement, celui-ci commence à 4 h 20. JMO : « Un brouillard intense et la difficulté du passage du ruisseau de l’Orne, franchissable en quelques points seulement, fit perdre la direction au bataillon de tête qui obliqua sur Warcq ». Les autres bataillons se maintenant dans la bonne direction franchissent l’Orne et débouchent sur la voie ferrée. Malgré une forte défense des Allemands celle-ci est prise en une demi-heure. Un mouvement tournant s’amorce pour prendre à revers le village de Boinville. Mais dès que les compagnies débordent de la voie ferrée conquise, elles sont prises sous un important feu d’artillerie qui les décime et les force à reculer. Complètement isolé le bataillon de tête reçoit l’ordre de battre en retraite sous la protection de deux sections de mitrailleuses. Ce mouvement se fait attendre et « ce ne fut qu’à 8 h 45, devant un mouvement ennemi débordant, que des hommes de la 9ème compagnie, privée de leurs officiers, s’enfuirent dans la direction du ruisseau de l’Orne entrainant avec eux le reste de la ligne malgré l’énergie des officiers restés debout et dont quelques uns avaient mis révolver au poing pour arrêter les fuyards ». Le Lieutenant Colonel, avec le drapeau du régiment, fait établir des barrages sur la route et rassemble ce qu’il peut des restes de ses bataillons. De nouveau les affrontements se portent sur la voie ferrée est ses talus. Le brouillard s’est levé et les soldats exposés peuvent voir que des troupes de soutien font demi-tour. Le feu est de plus en plus vif et les hommes, qui n’ont plus d’officiers tous tombés, lâchent pied et se replient. Le régiment se rassemble sur ses positions de départ à Braquis. Les pertes de la journée ont été très lourdes : 12 officiers ou sous-officiers tués, soldats environ 180. Plus une centaine de disparus et 630 blessés.

Montée au front pendant les vendanges
Parmi ces morts et disparus l’on compte, en plus de Louis-Camille FLOURET, quatre Anduziens : CHARDINOUX Louis-Auguste (30 ans), GERVAIS Alexandre-Louis, sergent (27 ans), PERSÉGOL Jules-René (27 ans), QUET Laurent-Auguste (29 ans). L’âge relativement élevé de ces quatre hommes s’explique par le fait que le 240ème était censé n’être au départ qu’un régiment de réserve en appui du 40ème d’active. Mais cette distinction n’a pas tenu longtemps devant l’exigence de combler les brèches creusées par les premiers désastres. ROUCHET Albert-Jean (31 ans), quant à lui, faisait partie d’un autre régiment d’infanterie, le 40ème, qui participait ce jour-là aux mêmes opérations. LAURET Aimé-Gaston (22 ans) se trouvait sur un autre front de Lorraine avec un autre régiment, le 75ème RI.

Tué le 25 août 1914 dans les combats de Saint-Maurice Warcq Boinville (Meuse), Louis-Camille FLOURET est inhumé au cimetière militaire de Buzy-Darmont, tombe 473.

A suivre…