BOURBIERS

87ème semaine

Du lundi 27 mars au dimanche 2 avril 1916

MORTELS BRICOLAGES

Edouard Bonnet, 4ème régiment d’Infanterie Coloniale,
mort le 29 janvier 1915 à Massiges (Marne)


Edouard Bonnet est né le 15 décembre 1894 à Nîmes, ses parents résident à Tornac et il exerce la profession de valet de ferme au moment de son recensement. Faisant partie de la classe 1914, appelée sous les drapeaux avec un peu d’anticipation à l’ouverture de la guerre, il est incorporé dès le 5 septembre, il rejoint son corps d’affectation, le 4ème régiment d’Infanterie Coloniale.

Le 4 RIC est un régiment d'infanterie de marine composé en temps de paix de soldats de métier, familièrement appelés les marsouins. Basé à Toulon il est donc immédiatement disponible pour participer aux premiers combats d’Alsace, au repli qui les suivent, puis à l’enfouissement dans les tranchées.

En fin d’année 1914, ce régiment est affecté au secteur de Massiges (Marne), cet imprenable promontoire en forme de main avec ses cinq doigts férocement tenus et fortifiés par les Allemands.

Le JMO du régiment raconte :
«  31 décembre 1914 – Les pluies continuelles ont détrempé les terres, qui n’ont plus aucune consistance, les tranchées et boyaux sont inondés. C’est un gros travail à fournir et toujours à recommencer pour les dégager. Les tranchées allemandes sont sans doute dans le même état et peu habitables, car les tirailleurs ennemis sont bien moins actifs et nos pertes ont pour ainsi dire disparu.
1er janvier 1915 – A signaler les envois abondants du ravitaillement pour donner aux hommes à l’occasion du 1er janvier un menu exceptionnel. Des particuliers ont également fait des envois, qui sont remis aux soldats les plus déshérités.
2 au 10 janvier – Aux tranchées, période calme de la part de l’ennemi. De notre côté un appareil lance bombes est mis en service (appareil Cellerier). Il est composé d’un corps d’obus de 77 allemand disposé en petit obusier, il lance une bombe composée d’une douille de 75 français, remplie de 3 pétards de dynamite et de projectiles divers. 


Les bombes lancées sur les tranchées les plus proches (entre 50 et 200 m) produisent un effet comparable à celui de l’obus explosif de 75. Les compagnies qui ont devant elles des tranchées à courte distance en lancent une cinquantaine tous les jours. L’effet produit doit être appréciable car les Allemands répondent par des coups de canon de 77, mais comme toujours ces coups sont presque sans effet sur nos hommes bien abrités dans les tranchées.




10 au 18 janvier – Les pluies persistantes rendent la situation de plus en plus difficile. A droite du secteur on est obligé d’évacuer les tranchées qui ne sont plus tenables, l’eau y sourd en abondance et tout effort pour l’évacuer devient inutile. Une section est également inondée, elle est déplacée et portée à droite de la compagnie. La tranchée abandonnée est transformée en bourbier infranchissable, un élément de parapet est dressé pour que les tireurs de la compagnie à gauche puissent l’enfiler de leurs feux et abattre tout ennemi qui s’y enliserait. Dans cette période la 9ème compagnie compte 5 blessés par les shrapnells tirés sur les lance bombes Cellerier, la 11ème compagnie a également 3 blessés dans les mêmes conditions.


Les abris de repos dans les tranchées, appuyés sur les parapets en terre, se sont tour à tour écroulés, ces parapets n’ayant plus aucune consistance. Un nouvel effort se fait dans cette période pour dresser des abris en planches, appuyés sur des montants en bois pris dans les maisons démolies de Virginy. Le génie commence à fournir de grandes tôles ondulées pour les toitures. Les planches sont fournies en abondance, si les tôles continuent à arriver chaque section arrivera enfin à être pourvue d’un bon abri.

Une tranchée à Massiges
22 janvier au 3 février – Le régiment rejoint Massiges. L’annulaire est tombé entièrement aux mains des Allemands. On se propose de reprendre les tranchées perdues. A la faveur de la nuit le bataillon Barbazan se porte au pied de la croupe, se dispose en colonnes d’escouades par 2, et progresse jusqu’aux bords de la 1ère tranchée dans laquelle il se jette au signal convenu. La surprise est si complète que le mouvement se continue jusqu’à la 2ème tranchée qui est également prise. Une mitrailleuse allemande est enlevée, tous les Allemands (plusieurs centaines) sont tués ou faits prisonniers. Quelques minutes ont suffi pour obtenir ce brillant résultat. Malheureusement nous le payons de la vie de beaucoup des nôtres, dont le capitaine Barbazan mort glorieusement à la tête de son bataillon. Tous les autres capitaines ont été mis hors de combat, il ne reste que 2 officiers au bataillon ».

Edouard Bonnet fait partie des soldats tués lors de ces offensives, il est porté « tué à l’ennemi » le 29 janvier 1915, à l’âge de 20 ans et 1 mois. Son nom figure sur la plaque de l’église d’Anduze ainsi que sur le monument aux morts de Tornac.


A suivre…