UNE SEMAINE PLUS CLÉMENTE

11ème semaine

Du lundi 12 au dimanche 18 octobre 1914

La première semaine sans morts à Anduze

Après l’hécatombe des deux premiers mois de la guerre (déjà 27 « Morts pour la France » à Anduze), c’est enfin une semaine où la municipalité n’aura pas de mauvaise nouvelle à distribuer à l’une ou l’autre des familles de la cité.

En août 1914 c’est le docteur Jean-Antoine Gaussorgues qui est maire depuis deux ans. Il est classé politiquement comme radical. Il a été diplômé en 1898 à la Faculté de Montpellier. Il semble avoir toujours exercé à Anduze.

Les élections municipales se sont déroulé les 5 et 12 mai 1912.
Le Conseil Municipal est alors composé des membres suivants : Berthézène César, Bonnet César, Brès Louis, Cabane César, Coulomb Louis, Deleuze Jules, Durand Louis, Faïsse Gédéon, Fesquet Almir, Roman Henri, Say Henri, Sayen Paul Simard Fernand (1er adjoint), Sprécher Théodore, Ture Isidore, Vielles Benjamin, Vielles Jules.


Le docteur Gaussorgues est un réaliste : contrairement à la plupart des Français de l’époque il pense, et l’exprime publiquement, que la guerre peut durer longtemps. Il fait prendre au Conseil Municipal dès le 2 août 1914, le jour même de la mobilisation, une résolution visant à « faire des achats de farine et autres denrées pour assurer le ravitaillement de la population ».

Et dès la mi-septembre il organise à Anduze deux établissements capables de recevoir des blessés :
HB n° 47 - Asile de vieillards "Bon Secours" - 37 lits
HB n° 48 - Ecole primaire "Bel Air" - 25 lits
Dans la nomenclature militaire HB signifiait « hôpital bénévole créé sur l’initiative d’une personne morale publique (ex : une commune) ou privée (association de bienfaisance, communauté religieuse, etc.) ».


La tâche la plus pénible pour les élus municipaux est certainement à cette époque d’informer les familles du décès de l’un de leurs proches.

Les Français sont mal informés sur les combats et sur l'évolution du conflit. La presse est lourdement mensongère en août 1914. Ensuite elle ne publie plus que des communiqués du gouvernement et de l'Etat-major ; même quand ils sont exacts, les lecteurs restent méfiants, trop conscients du bourrage de crânes. Les correspondances sont soumises au contrôle postal ; les soldats n'ont pas le droit de donner des indications précises ; afin de ne pas inquiéter leurs familles, ils se montrent évasifs ou plutôt optimistes. Les blessés et les permissionnaires sont questionnés en permanence ; en général, ils se montrent peu diserts. Les magazines, même s'ils sont remarquablement illustrés, sont fortement orientés, ils ne montrent jamais un cadavre français.

En dépit de tous ces silences, tout le monde sait que la guerre tue beaucoup, car il faut bien tôt ou tard prévenir les familles. Le système est long à se mettre en place. Les premiers avis de décès parviennent dans les mairies à la mi-août. Un employé municipal tient un petit cahier qui transcrit au jour le jour les avis reçus par télégramme, parfois par téléphone ou par lettre du commandant de l'unité. Comme les communes périphériques sont moins bien reliées, les avis passent parfois par Nîmes et compliquent la comptabilité.

Un vocabulaire spécifique est mis en place. Seulement "tués à l'ennemi" ou "disparus" au début de la guerre, les soldats tués sur le champ, les blessés décédés ou les malades morts en service commandé seront déclarés « Morts pour la France » à partir de la loi du 2 juillet 1915. Une circulaire ministérielle viendra régir l'ajout de cette mention marginale sur les registres d'état civil.

L’avis n’est pas toujours précis quant aux circonstances du décès. Mais il est spécifique pour une mort authentifiée par des témoignages ou par le cadavre lui-même, dans ce cas le document est du type suivant :


Pour une disparition, très fréquente lors de cette première phase de la guerre dite « de mouvement », ce n’est pas le même libellé :


A suivre…

Chronologie générale de la 11ème semaine (Source : e-chronologie) :

12 octobre :
Capitulation des troupes françaises défendant Lille
Prise de Gand par les Allemands
14 octobre :
Le gouvernement belge s’installe au Havre
16 octobre :
Début de la bataille de l’Yser
18 octobre :
Offensive allemande sur l’Yser