QUE FAIRE DES RÉFUGIÉS ?

41ème semaine

Du lundi 10 au dimanche 16 mai 1915

Au Conseil Municipal d’Alais

Séance du 24 février 1915


Le conseil municipal d’Alais, réuni hors séance :
Considérant que la campagne menée contre les contingents du midi est aussi injuste qu’odieuse,
Que les auteurs et propagateurs de ces insinuations malveillantes sont d’autant plus inexcusables qu’ils ont sciemment et volontairement altéré la Vérité, (Note : voir semaines 37 et 38 de ce blog)
Qu’en effet tous les champs de bataille de l’Yser à l’Alsace ont été abondamment arrosés par le sang de nos vaillants méridionaux dont le journal officiel relate chaque jour, au chapitre des citations à l’ordre de l’armée, les actes innombrables d’héroïsme et de dévouement,
Envoie au généralissime Joffre, illustre enfant du midi, à tous les chefs valeureux de nos armées, à tous les soldats héroïques de France, sans distinction d’origine, l’expression de son admiration et de sa patriotique confiance dans la glorieuse issue de la Guerre,
Prie instamment le gouvernement de réprimer avec la dernière sévérité toute tentative de nature à rompre l’Union sacrée de tous les français devant l’ennemi, union bienfaisante et féconde qui depuis le début des hostilités a imposé le respect au monde entier,
Salue avec joie le retour à la Mère Patrie de ses frères d’Alsace et de Lorraine qui depuis près d’un demi-siècle, subissent le martyre de la domination prussienne,
S’incline avec émotion sur la tombe de tous nos chers enfants de France, morts au champ d’honneur, et en particulier de nos compatriotes Alaisiens dont la Cité gardera et perpétuera le souvenir,
Adresse enfin l’expression de son enthousiasme et de sa reconnaissance aux puissances alliées, qui combattent avec nous pour la grande cause de la Civilisation, du Droit et de la Liberté.
Cet ordre du jour est adopté par acclamation.

La déroute des Français lors des premiers combats en Lorraine, illustration allemande
Livre d’or du 15ème corps
Sur avis favorable de la commission des finances le conseil municipal de décide de souscrire à un exemplaire du livre d’or du 15e corps. La dépense de 20 FRF sera payée sur l’article 54 du budget de 1915.

Versement des employés communaux
M. Le maire expose au Conseil Municipal que les employés communaux ont décidé à l’unanimité de prélever sur leurs appointements et pendant toute la durée de la guerre un pourcentage en faveur des œuvres d’assistance locale.
Le conseil municipal donne acte aux employés municipaux de leur décision d’effectuer une retenue de 3 % sur leur traitement au bénéfice des œuvres d’assistance locale, leur adresse des félicitations, émettant le vœu que tous les fonctionnaires émargeant au budget communal au titre d’indemnité, décident à leur tour de laisser un pourcentage en faveur des mêmes œuvres, comme il a été fait par le personnel émargeant au titre de traitements.

Le flot des réfugiés du Nord et de l'Est de la France
Réglementation concernant les réfugiés
Monsieur Lévy premier adjoint chargé du service des réfugiés donne lecture au conseil municipal du rapport suivant :
Par une lettre en date du 16 février 1915, M. Le sous-préfet a fait connaître à monsieur le maire que par décision du général Servière le personnel militaire qui assurait à Alais le service des réfugiés serait retiré le 28 février et qu’il appartenait à la commune de prendre des dispositions en vue de cette suppression.
M. Le maire et Monsieur Lévy premier adjoint qui s’était chargé de la surveillance de ce service se sont rendus immédiatement auprès de M. Le préfet, qui n’a pu que confirmer les termes de la décision de M. Le général Servière et y ajouter ses regrets. Avec beaucoup de bienveillance, il nous a fait visiter le local de l’Assomption à Nîmes où le comité des réfugiés fonctionne d’une façon parfaite. Nous avons pu constater l’excellente organisation des vastes locaux, la quantité considérable de vêtements et chaussures à la disposition du comite et le zèle incessant et dévoué du personnel qui assure le travail. Nous avons également appris que les dons en nature et en espèces ne cessaient d’être alloués, à tel point que le comité possède en caisse une somme de 12 000 FRF environ.
Ces constatations ont immédiatement mis en évidence l’infériorité de notre service et nous ont amenés à faire les observations suivantes : A Nîmes, le comité riche ayant à sa disposition des locaux immenses et des services bénévoles nombreux. A Alais le comité qui avait été formé n’a pu continuer la tâche qu’il s’était imposé, quel que soit le dévouement et le zèle déployés par ses membres. Les ressources seules ont manqué. L’administration supérieure a alors imposé à la municipalité la charge d’assurer ce service dans la commune, charge qu’elle a acceptée bien volontiers et qu’elle s’efforcera d’améliorer selon ses moyens.
C’est sur ce dernier point que nous voulons surtout attirer votre attention. Le nombre des réfugiés à secourir, à aider, importe peu. Les ressources et les moyens mis à votre disposition sont proportionnés à ce bon nombre. Il faut remarquer que pour notre commune, les charges ont été toujours au dessus de ses moyens. Sans vouloir critiquer la moindre des choses, ce n’est pas trop s’avancer que de dire que Nîmes par exemple, à raison de sa population, n’a pas les mêmes charges qu’Alais en réfugiés, blessés, malades etc… et au contraire a eu des avantages sérieux en tant que troupes, alors qu’Alais en a été totalement dépourvue.
Ne nous plaignons pas, et acceptons au nom de notre population toutes les charges pour si lourdes qu’elles soient mais il est de notre devoir de sauvegarder les deniers de notre commune et nous ne pouvons admettre de prendre à charge de la commune de Alais seule, toutes celles incombant aux diverses communes de l’arrondissement.
L’organisation actuelle du service des réfugiés, comprend six militaires, dont un sous-officier, très au courant du service, il peut être considéré comme une annexe du dépôt central de Nîmes, puisque c’est Alais qui reçoit et réexpédie dans les communes tous les réfugiés destinés à l’arrondissement d’Alais. Annexe sérieuse puisque les états de présence actuelle des réfugié égalent, s’ils ne les dépassent, ceux de Nîmes, mais combien plus pauvres ! !


Nous vous proposons donc la solution suivante :
Demander à M. Le préfet que les répartitions des réfugié à charge d’entretien pour chaque commune du département soit faite proportionnellement aux chiffres de la population et aux ressources de cette population, en tenant essentiellement compte que les ressources de certaines communes ne sont pas en rapport avec le nombre des habitants, ceux-ci appartenant, comme à Alais par exemple, en grande majorité à la classe ouvrière.
Qu’une fois cette proportion fixée pour la commune d’Alais, il soit décidé que sous le contrôle constant de l’autorité supérieure, la municipalité ait à sa charge et sous sa responsabilité l’entretien, le transfert, le placement de l’effectif qui lui est affecté. Que dans aucun cas les effectifs destinés aux communes de l’arrondissement ne lui soit adressés, et que dans aucun cas ces communes ne puissent évacuer leurs réfugiés sur Alais afin que cette dernière puisse être considérée comme un dépôt auxiliaires de celui de Nîmes qui est le seul et unique dépôt du département, ce qui, à notre avis n’est que l’application intégrale des instructions de M. Le préfet du Gard qui ont été affichées et publiées.
Cette décision si elle était acceptée éviterait bien des ennuis et des complications, nous n’aurions pas à regretter que tel ou tel réfugié qui a été envoyé directement dans telle commune s’arrête à Alais à demeure fixe, ou bien encore que tel ou tel autre évacué dans une commune des environs ne quitte cette commune pour venir prendre pension à Alais.
Nous aurions au moins également la certitude de voir nos nombreuses demandes de vêtements faites en faveur de nos réfugiés, arriver à destination.
Nous devons ici vous indiquer que devant le stock considérable de vêtements qui sont au dépôt de Nîmes nous avons été surpris que ce dépôt nous ait envoyé des réfugiés dans le dénuement le plus complet, il nous a été répondu qu’on accordait immédiatement des vêtements à toutes les communes qui en faisaient la demande. Vous voyez notre étonnement à cette réponse alors qu’aucune de nos demandes n’a encore reçu satisfaction.
Après enquête immédiate, il a été reconnu que le dépôt n’avait jamais été touché par nos demandes. Il nous est aujourd’hui confirmé par le service que nos demandes adressées à la sous-préfecture fin décembre et courant janvier n’ont jamais reçu de réponse.
En résumé et pour bien préciser la situation, la mettre en conformité avec les instructions préfectorales d’apporter aux réfugiés en général le concours le plus absolu, nous concluons :
1° - A ce qui a été indiqué plus haut : fixation du contingent à la charge des communes. Entretien par la commune de celui affecté à la ville d’Alais conformément aux instructions préfectorales.
2° -  Subsidiairement appel à un comité local qui deviendrait l’auxiliaire du comité de Nîmes pour la répartition dans les communes de l’arrondissement, en raison des aptitudes des réfugiés et des demandes des communes ce qui éviterait l’envoi de cultivateurs dans des centres industriels et des ouvriers industriels dans des centres agricoles.
Etant bien entendu que ce comité n’aurait rien de commun avec le service municipal chargé du contingent communal.
M. Lévy indique au Conseil que depuis la rédaction de ce rapport la question du bureau militaire a été tranchée. Celui-ci continue à fonctionner comme par le passé, seul le sous-officier qui rentre au dépôt de Nîmes sera remplacé par M. Le capitaine La Mareille dans la direction effective et la surveillance du service.
Les conclusions de ce rapport mises aux voix se sont adoptés et converties en délibération.

Vin aux soldats
Le Conseil Municipal envoie devant la Commission des finances une proposition de M. Monnier tendant à ce que la commune se charge elle-même de fournir du vin aux soldats sur le front.


Noms des rues et places
Le Conseil Municipal, tout en approuvant le principe, renvoie devant la commission des travaux publics :
1° - Une proposition de M. Monnier demandant à ce que le nom de Garibaldi soit donné à une rue ou une place de la Ville,
2° - Une proposition de M. Dastarac demandant à ce que le nom d’Albert 1er soit donné à une rue ou une place de la Ville,
3° - Une proposition de M. Lévy demandant que la place de l’Etoile soit appelée place Général Joffre.

A suivre…