166ème
semaine
Du
lundi 1er au dimanche 7 octobre 1917
Ce blog se poursuit sur un double plan temporel :
- avec une correspondance exacte de cent ans pour les Anduziens
- avec un chronologie reprise depuis le début 1914 pour les Tornagais
CAPORAL
DES SÉNÉGALAIS
Almir
Rieu, caporal au 5ème bataillon de tirailleurs sénégalais
disparu
le 15 août 1917 à Vauclerc (Aisne)
Almir Rieu est né le 10 novembre
1895 à Tornac, de Louis-Adrien et d’Augustine Frigoulier. Son prénom est rare, il
n’y a pas de saint Almir. On ne trouve que moins de 0,002% de porteurs de ce prénom en
France aux 18ème et 19ème siècles. Il est cultivateur, la
mobilisation l’appelle par anticipation, comme tous ceux de la classe 1915. Il
est affecté au 8ème régiment d’infanterie coloniale dès le 17
décembre 1914. En novembre 1916 il passe caporal et effectue un séjour, sans
doute de formation, au camp de Fréjus, particulièrement dédié à la préparation
des troupes coloniales.
Le 15 août 1917 il disparait sur
le plateau de Vauclerc (Aisne), son décès ne sera reconnu officiellement qu’en
juillet 1920.
Sur le point de son appartenance à
tel ou tel régiment au moment de sa disparition les documents sont
contradictoires :
- son registre matricule ne fait
aucune mention d’un changement d’affectation,
- alors que sa fiche de décès
« Mémoire des Hommes » le porte comme appartenant au 5ème
bataillon de tirailleurs sénégalais.
En fait il est clair qu’il
n’appartenait plus en 1917 au 8ème RIC car celui-ci était parti pour
les Balkans en décembre 1916, il y participa aux combats de la boucle de Cerna
près de Monastir.
C’est donc bien au 5ème
bataillon de tirailleurs sénégalais que combattait Almir Rieu en 1917 comme
caporal.
Entre 1914 et 1918, 165 229 hommes
furent recrutés en Afrique occidentale française et 17 910 en Afrique
équatoriale française pour former 137 bataillons de tirailleurs sénégalais mis
sur pied pour la guerre. Leur encadrement était assuré par des sous-officiers
et officiers français.
Ces hommes combattirent sur le
front de France, aux Dardanelles et sur le front d’Orient. 24 938 soldats
africains trouvèrent la mort (ou furent portés disparus) dans ces combats et 36
000 furent blessés.
De nombreuses décorations —
individuelles et collectives — leur furent décernées. 36 citations collectives
à l'ordre de l'armée furent décernées aux bataillons de tirailleurs sénégalais.
Huit d’entre eux reçurent la fourragère aux couleurs de la croix de guerre.
Des Sénégalais découvrant la neige... |
A la tête des armées françaises
depuis le début de la guerre, le général Joffre est remplacé le 13 décembre
1916 par Robert Nivelle alors qu’après l’échec des offensives d’Artois et de
Champagne en 1915 et dans la Somme en 1916, il a préparé le plan d’une nouvelle
offensive entre Soissons et Reims pour le début de l’année 1917.
Reprenant en partie le plan de
Joffre, Nivelle promet d’opérer une percée décisive sur le Chemin des Dames «
en 24 ou 48 heures ».
Plusieurs fois reportée, notamment
suite au repli stratégique allemand sur la ligne Hindenburg (ou Siegfried), et
même remise en cause (le 6 avril, Nivelle propose sa démission qui est
refusée), l’offensive est finalement fixée au 16 avril à 6 heures du matin.
Plus d’un million d’hommes ont été
rassemblés sur un front de 40 km entre Soissons et Reims : placée en
réserve, la Xe armée est chargée d’exploiter les succès des Ve et VIe armées
qui doivent rompre le front. Pour la première fois du côté français, des chars
d’assaut doivent être engagés.
Une longue et intense préparation
d’artillerie qui commence le 2 avril, compromet tout effet de surprise et
surtout, ne détruit que très partiellement les défenses allemandes.
Le 16 avril, quand les premières
vagues s’élancent à l’assaut du plateau du Chemin des Dames, elles se heurtent
à des barbelés souvent intacts et elles sont fauchées par le feu des
mitrailleuses allemandes.
Le mauvais temps (pluie, neige et
froid) n’est pas sans conséquences, en particulier dans les bataillons de
tirailleurs sénégalais, des troupes en fait recrutées dans toute l’Afrique
occidentale française, de Cotonou à Bamako et d’Abidjan à Tombouctou.
Dès les premières heures,
l’offensive apparaît comme un échec sanglant. Mais, malgré des pertes
particulièrement élevées (30 000 tués et 100 000 blessés en 10 jours du 16 au
25 avril) et en dépit de ses promesses, Nivelle s’obstine au-delà des « 24 ou
48 heures » annoncées…
Du 27 au 30 juin 1917 toute la
presse française et internationale résonne d’un évènement qui va faire entrer
une « creute » du Chemin des Dames dans l’Histoire : la reprise de la
Caverne du Dragon par les troupes françaises. Derrière ce nom mythique, une
ancienne carrière, devenue une véritable caserne et un arsenal souterrain
allemand qui avait causé de nombreuses pertes à la 10e division d’infanterie
coloniale le 16 avril 1917.
Dans les semaines qui suivirent,
les troupes françaises entreprirent d’en faire peu à peu le siège en
progressant sur l’isthme d’Hurtebise. Le 25 juin 1917 dans la soirée, après une
attaque de la 164e division d’infanterie qui conduit à la capture du 1e
bataillon du 57e régiment d’infanterie allemand qui tenait la caverne, les
combattants français redécouvrent ainsi un endroit transformé en forteresse
dont les galeries reliaient les deux versants du Chemin des Dames dans le plus
grand secret… Une victoire dont l’armée française avait bien besoin et qui fera
de ce site l’un des plus connus du champ de bataille.
Puis les combats se poursuivent
sur les plateaux comme celui de l'ancien moulin de Vauclerc encadrant le Chemin des Dames :
Semaine du 30 juillet au 5 août
1917 - Les deux armées se montrent plutôt tranquilles, en dehors des activités
traditionnelles. Des mouvements de troupe expliquent en partie ceci. - De
nombreux petits combats très localisés, pour une tranchée ou un point haut, ont
cependant lieu ; ils ne concernent qu’un petit nombre de soldats, mais
sont très violents et se traduisent par des avancées et des reculs très
fréquents. - Le 30 juillet par exemple, le 8e groupe de Chasseurs à pied
reprend les tranchées de la Gargousse et du Salpêtre, dépasse même localement
le Chemin des Dames avant d’être légèrement repoussé dans la nuit ; plus de 200
prisonniers, dont de nombreux officiers et sous-officiers, sont capturés. - Le
2, toujours côté français, « une compagnie du 21e BCP (13e DI) exécute un
brillant coup de main sur le saillant ennemi 88.51 dit du « Tas de fumier ». 3
groupes d’une dizaine d’hommes, dirigés chacun par 1 officier ou Aspirant,
ramènent sans perte 27 prisonniers et 1 mitrailleuse. » (JMO VIe Armée)
Semaine du 6 au 12 août 1917 -
Début de semaine seulement marquée par d’importants duels d’artillerie, à la
fois à longue portée et (surtout) de tranchées. - Le 10, les Allemands essaient
de reprendre une partie du terrain perdu le 30 juillet autour de la tranchée de
la Gargousse ; c’est un échec, malgré le lourd bombardement préparatoire et
accompagnant l’action, notamment à l’aide de nombreux obus toxiques. Pertes
considérables des deux côtés (plus d’une centaine d’Allemands restent aux mains
des Français).
C’est dans l’un de ces obscurs
combats que disparaît le 15 août 1917 le caporal Almir Rieu, 21 ans. Son nom figure sur le monument aux morts de
Tornac, ainsi que sur le livre d’or du ministère des pensions, lui ouvrant le
droit à l’appellation « Mort pour la France ».
A suivre…