Semaine
170
Du
lundi 29 octobre au dimanche 3 novembre 1917
GARDER LE TERRAIN CONQUIS
Ce blog se poursuit sur un double plan temporel :
- avec une correspondance exacte de cent ans pour les Anduziens
- avec une chronologie reprise depuis le début 1914 pour les Tornagais
Albert-Auguste
GOUT, soldat au 240ème régiment d’infanterie
Tué
le 6 septembre 1914 à Saint André Hoche ou Souilly (Meuse)
Albert-Auguste Gout est né à Tornac le 9 juillet 1885,
d’Auguste et de Léonie-Augustine-Jenny née Soulier. En 1905 il est cultivateur.
Il fait son service militaire d’octobre 1906 à septembre 1908, puis une période
d’exercice en mars 1912. Rappelé à l’armée le l2 août 1914 il est incorporé au 240 RI.
Ce régiment, formé à Nîmes,
commence par être affecté dans le Sud-Est à Avignon, dans l’attente d’une prise
de position de l’Italie, pour l’Allemagne ou pour les alliés. Finalement ils
optent pour les alliés, et les troupes réservées à un éventuel front des Alpes
peuvent remonter vers le Nord ou vers l’Est. Le 240 RI en fait partie. En
principe c’est un régiment de renfort destiné à soutenir le régiment d’active
40 RI, mais dans les faits ses soldats sont immédiatement jetés dans la
bataille tant on a besoin d’hommes dans ce premier mois de guerre
épouvantablement meurtrier.
Historique du 240ème Régiment
d'Infanterie :
« Le 20 août, la division est
embarquée en chemin de fer pour se rendre dans la région de Verdun. Le 21 août,
l'Etat-Major et le 5ème Btn cantonnent à Challaines, près de Vaucouleurs, et le
6ème à Belleville, près de Verdun.
Le 22 août, le régiment est dans
la région Ambly-sur-Meuse, Ronzières et le 23 à Rupt-en-Woëvre.
Le 24 août, le 240ème va recevoir
le baptême du feu. Dès le matin, il se porte sur Fresne-en- Woëvre et de là sur
Braquis où il arrive vers 15 h. Là, il reçoit l'ordre de se diriger sur
St-Maurice, bois de Rouvre et Gondrecourt et d'attaquer l'ennemi là où on le
rencontrera.
Pris au débotté; le régiment se
porte en avant, ayant comme objectif la ligne ferrée Conflans-Etain, fortement
occupée par l'ennemi. Soumise à un violent feu d'artillerie, venant des
hauteurs à l'Est d'Etain, et par celui des mitrailleuses de la chaussée du
chemin de fer, la première ligne ne progresse que très lentement. La nuit met
fin au combat et le régiment reste sur.ses positions.
Le 25, à 2 heures, arrive l'ordre
de continuer l'attaque. Un brouillard épais couvre toute la vallée de l'Orne,
qu'il faut franchir à gué. Le mouvement commence à 3 h. 30. Malheureusement un
bataillon perd sa direction; l'autre, pris sous un feu tres violent, engage le
combat, oblige l'ennemi à lui céder la voie ferrée ; mais, n'étant pas soutenu,
sa situation devient critique. La plupart des officiers et des gradés sont hors
de combat; les pertes sont énormes. Le Lt-Colonel ordonne de battre en
retraite, retraite pénible qui s'effectue sous la protection de la section de
mitrailleuses du lieutenant Varin d'Ainvelle qui tire jusqu'à épuisement
complet de ses munitions. L'ennemi n'est plus qu'à 50 mètres. Les pièces sont
alors démontées sous un feu infernal, jetées dans l'Orne et les quelques
survivants se retirent avec leur officier, en emportant les culasses.
Pendant ce temps, le Lt-Colonel
Grillot, qui avait fait le coup de feu lui-même, prenait le drapeau et,
accompagné de sa garde et d'une section de réserve, rassemblait les divers
éléments du régiment qu'il arrivait à conduire vers 12 h. à Braquis.
Cette première prise de contact
avec le Boche coûtait au régiment 5 officiers (dont 1 commandant) tués, 7
blessés et près de 900 sous-officiers et hommes tués, blessés ou disparus.
Le 26 août, le régiment se replie
sur St-Rémy et les Eparges. Après avoir cantonné à Dommortin la Montagne et
Creué il se trouve le 31 à Douaumont où, après une randonnée dans la direction
de Haumont, il revient le 2 septembre pour se porter, encore dans la même
journée, sur Fleury, et de là sur les Hauts de Meuse.
Le 6 septembre, nous le retrouvons
dans la région Heppes-Souilly. La commune de Souilly, près de Verdun, entre
dans la Grande Guerre dès les premiers mois des hostilités. La grande offensive
allemande d'août 1914 en direction de Paris déborde Verdun sur sa droite et le
front s'approche du village fin août. La bataille de la Marne se dessine en
notre faveur, mais l'ennemi engage de violents combats d'arrière-garde pour se
dégager.
Le régiment attaque en direction
d'Ippécourt. Mal soutenu par une artillerie, inférieure à ce moment, il ne peut
progresser sérieusement et ce n'est que le 7 au soir que les 20ème et 22éme
Cies arrivent à occuper le village d'Ippécourt. Mais, dans la matinée du 8, une
violente attaque ennemie oblige les troupes avoisinantes à se replier. Le
240éme continue à lutter seul, puis, doit se retirer à son tour. Le 10 il est
relevé de la zone de feu.
Le 240 RI a été très éprouvé
pendant ces cinq jours de lutte. Son effectif ne dépasse plus 900 hommes (2 195
au départ de Nîmes) ».
Parmi les morts ou disparus de ce
régiment au cours de ce premier mois de guerre, il y a déjà six Anduziens, sans
compter une dizaine d’autres dans d’autres régiments. Comment la population de
ces villages a-t-elle pu supporter ces terribles nouvelles répétées, alors que
les communiqués officiels ne parlaient que de replis stratégiques ou
d’héroïques défenses ?
Le décès d’Albert-Auguste Gout, fixé au 6 septembre 1914 à Saint André Hoche
ou Souilly, ne sera reconnu officiellement qu’en mai 1918. Il sera en outre cité
à l’ordre du régiment le 3 mai 1919. Son nom figure sur le monument aux morts
de la commune, ainsi que sur son Livre d’Or. Le même jour, au même endroit,
meurt aussi le soldat Charles-Jean Gazay, instituteur de Saint-Hippolyte du
Fort.
C’est au début de ce mois de septembre
que Joseph Joffre, commandant en chef des opérations de l’armée française, après
avoir organisé la retraite des Français avec calme et méthode, décide de
repasser à l’offensive avec tous les moyens disponibles. De son quartier
général de Châtillon-sur-Seine, dans l’ancien couvent des Cordeliers, il rédige
le 5 septembre au soir un ordre du jour qui sera diffusé le 6 à 7 h 30 du
matin : « Au moment où s’engage une
bataille dont dépend le sort du pays, il importe de rappeler à tous que le
moment n’est plus de regarder en arrière. Tous les efforts doivent être
employés à attaquer et à refouler l’ennemi. Une troupe qui ne peut plus avancer
devra, coûte que coûte, garder le terrain conquis et se faire tuer sur place
plutôt que de reculer. Dans les circonstances actuelles, aucune défaillance ne
peut être tolérée. »
A suivre…