LES RUINES DU CHÂTEAU DE COUCY


189ème semaine

Du lundi 11 au dimanche 17 mars 1918

Ce blog se poursuit sur un double plan temporel :
- avec une correspondance exacte de cent ans pour les Anduziens
- avec une chronologie reprise depuis le début 1914 pour les Tornagais

UN OBSERVATEUR COMPÉTENT ET DÉVOUÉ

Fernand CAZALIS, soldat au 97ème Régiment d’Infanterie
Tué à l’ennemi le 25 mars 1917 à Coucy-le-Château (Aisne)


Fernand CAZALIS est né le 27 septembre 1894 à Tornac, fils de Pierre et de Lyda née Dupont. Il réside à Saint-Félix de Pallières, où il est cultivateur. Incorporé à dater du 7 septembre 1914 au 52 RI, passé au 158 RI le 19 mars 1916, puis au 97 RI le 8 avril 1916. C’est un régiment d’infanterie alpine, basé à Chambéry, normalement dévolu à la défense des Alpes. Mais l’entrée en guerre des Italiens du côté des Alliés a rendu inutile la défense de cet espace, et les troupes alpines sont, comme les autres, versées dans les tranchées du front Nord-Est.


Il y a deux historiques du 97 RI. L’un est extrêmement succinct, et ne donne aucun détail concernant les opérations. L’autre est plus explicite, et d’un style peu ordinaire pour un historique de régiment, c’est de celui-ci qu’est l’extrait suivant :
« Nouvron - Vingré - Coucy 1916-1917
Un soldat du 97e RI
Le 97 retiré du front à la fin d'octobre, se rendit au camp de Coeuvres et Vairsery, où pendant le mois de novembre, il pensa ses blessures, se remit à l'entraînement et à l'instruction. Le 4e bataillon fut alors définitivement dissous. Au commencement de décembre, transporté au nord de l'Aisne à l'ouest de Soissons, il s'établit dans le secteur de Nouvron - Vingré. L'hiver s'écoule tristement : il fait froid sur ce plateau dénudé, que balaie une âpre brise et, pour tromper l'attente, de part et d'autre, les adversaires se tâtent dans de continuels coups de main, précédés et suivis de copieux et meurtriers bombardements.
Les tranchées s'évasent, les boyaux se comblent, les fils de fer disparaissent au cours de ces tentatives, et sous le vent, la neige, la pluie ou le froid, on répare la tranchée, les boyaux, les abris ou les réseaux barbelés. Mais l'hiver s'achève et une rumeur circule : les Allemands n'ont pas voulu attendre l'offensive que nous devons déclencher dès le début du printemps. Les patrouilles se font plus nombreuses sur le front : le 17 mars à minuit, celles envoyées par le 3e bataillon ont pénétré dans les lignes adverses et les ont trouvées vides ».

En effet la France prépare à ce moment-là une énorme offensive dans ce secteur. Les Allemands préfèrent alors se replier vers ce qu’ils appellent la ligne Hindenburg,
C’est un vaste système de défenses et de fortifications construit par les forces armées allemandes pendant l'hiver 1916 – 1917. La ligne s'étend sur près de 160 km de Lens, près d'Arras (Pas-de-Calais), à l'Aisne, près de Soissons. Elle a été construite en 5 mois par 500 000 ouvriers dont des civils allemands et des prisonniers de guerre russes. Les Allemands voulaient mettre en œuvre une stratégie défensive fondée sur la fortification de leur ligne. Ils s'installent donc en hauteur pour pouvoir tirer en contrebas sur les troupes des alliés.
La décision de commencer la construction d'une telle ligne est prise par les généraux Paul von Hindenburg et Erich Ludendorff à la suite de la bataille de la Somme. La ligne Hindenburg est construite à travers une poche sur le front allemand. Ainsi, en se retirant jusqu'à ces fortifications, l'armée allemande raccourcit sa ligne de front. La longueur totale du front est réduite de 50 km permettant aux Allemands de libérer 13 divisions du service et de les mettre en réserve.
La retraite jusqu'à la ligne débute en février 1917. Le territoire entre le précédent front et la nouvelle ligne est dévasté par les Allemands qui emploient la tactique de la terre brûlée. Cette opération s'accompagne de la déportation, principalement vers les Ardennes, de la population civile demeurée en territoire occupé. Les fortifications comprennent des bunkers en béton armés de mitrailleuses, entourés de plusieurs lignes de fil barbelé, reliés entre eux par des tunnels pour déplacer les troupes, de profondes tranchées, des abris contre les obus et des postes de commandement. À un kilomètre en avant des fortifications, une ligne plus légère d'avant-postes doit ralentir et perturber l'avance ennemie.


L’un des éléments importants de l’ancienne défense allemande se situait à Coucy, dominé par une vaste forteresse médiévale. La ville de Coucy-le-Château-Auffrique fut occupée pendant 3 ans par les armées allemandes. En 1917, lors de son repli sur la ligne Hindenburg et bien que cela ne se justifiât pas d'un point de vue stratégique mais résultant plutôt d'une décision prise en amont qui était de détruire les lieux culturels occupés lors du repli, elles décidèrent de détruire le site fortifié. Ainsi, 28 tonnes de cheddite furent placées dans le donjon et plus de 10 tonnes dans les tours du château. Pour les trois portes d'entrée de la ville, de plus petites charges furent utilisées. L’explosion eut lieu le 27 mars 1917. Au même moment, la ville de Coucy-le-Château-Auffrique fut bombardée et dévastée par des tirs d’artillerie.


Suite de l’historique du 97 RI :
« L'ordre est aussitôt donné, la poursuite générale commence.
Le régiment se dirige par Morsain, Vezaponain, arrive le 21 au soir, sur les bords de l'Ailette ; franchit le ruisseau sur quelques passerelles de fortune, construites à la hâte, occupe en dépit de quelques coups de feu le moulin de Nogent et la sucrerie des Michettes.
Il continue son mouvement, arrive devant le château de Coucy bâti sur un promontoire et dont le 1er et 2e bataillons s'emparent en le contournant par les ravins, l'un au nord, l'autre au sud, poussent encore sur le plateau vers le nord-est où ils se heurtent, le 28, aux ouvrages avancés de la nouvelle position allemande. Vouloir s'en emparer sans l'appui de l'artillerie serait folie et il faut attendre que celle-ci, retardée par tous les obstacles créés par les Allemands au cours leur retraite, soit en mesure de nous aider. Le 12 avril les 1er et 3e bataillons enlèvent brillamment les positions, font de nombreux prisonniers et arrive à la fameuse ligne Hindenbourg.


Il n'y a plus qu'à s'organiser sur place et attendre que la grande offensive franco-anglaise annoncée depuis si longtemps se déclenche et procure des résultats. Chacun travaille avec ardeur, tranchées, boyaux, abris se creusent, s'approfondissent, les fils barbelés se tendent, et, vers le début de mai, le régiment relevé peut léguer à son successeur un secteur presque complètement installé.
L'offensive, en effet, n'avait pas réussi. Le repli des Allemands au nord de l'Aisne avait rendu complètement inutiles les formidables préparatifs qui, nécessaires à une entreprise d'une pareille envergure, avaient été accumulés de ce côté au cours des mois précédents et leur avait permis de concentrer sur le front Soissons - Reims - Champagne une puissance de moyens supérieure à celle dont nous pouvions disposer ».

C’est dans ces circonstances qu’est mort le jeune Fernand CAZALIS, 22 ans dont plus de deux ans de guerre, tué à l’ennemi le 25 mars 1917 à Nouveau-Vingré (Aisne), tranchées de Coucy le Château.


Il est cité à l’ordre du corps d’armée du 7 avril 1917 : « Excellent soldat, a rendu à ses chefs d’utiles et d’excellents services dans ses fonctions spéciales d’observateur qu’il remplissait avec compétence et dévouement. Blessé très grièvement dans la tranchée le 24 mars ». Décoré de la Croix de guerre.
Il est inhumé à la Nécropole nationale de Champs (Aisne), Carré 4, tombe 160.
Il figure sur les Monuments aux morts de Tornac et de Saint-Félix de Pallières, ainsi que sur le Livre d’or de Saint-Félix de Pallières.

A suivre…