193ème
semaine
Du
lundi 8 au dimanche 14 avril 1918
Ce blog se poursuit sur un double plan temporel :
- avec une correspondance exacte de cent ans pour les Anduziens
- avec une chronologie reprise depuis le début 1914 pour les
Tornagais
LES
CANONNIERS MÉCANICIENS
Clément-Paul
BERTHEZENE
Canonnier
au 69ème Régiment d’Artillerie à Pied
Mort
le 7 avril 1918 à Bourgoin (Isère)

Jusqu’en 1914, l’armée ne consacre
pas de moyens importants à la voie étroite de 0,60 m. Elle équipe seulement les
réseaux des quatre grandes places fortifiées de l’est. Le stock de voies
ferrées est faible et il n’existe aucune unité spécialisée dans la gestion des
chemins de fer à voie étroite. Le Génie, vexé que l’écartement métrique n’ait
pas été retenu en 1888, ne s’occupe que des gros travaux d’infrastructure et
laisse la gestion du 0,60 m à l’artillerie. La voie de 60 n’est pas une priorité
pour l’état-major et son rôle dans les plans de mobilisation reste mineur.
Suivant la doctrine de l’offensive « à outrance », qui prévaut de longue date
au sein de l’état-major, on prévoit une guerre courte, une victoire rapide
obtenue quel que soit le coût humain. La guerre de position n’est pas prise en
compte. Les Allemands envisagent la voie de 0,60 m sous un angle plus
dynamique, la pose des voies devant intervenir rapidement au fur et à mesure de
l’avance des troupes. C’est pourquoi les eisenbahntruppen (troupes des chemins
de fer) comptent déjà 10 000 hommes avant le déclenchement du conflit, alors
que la France ne compte que 4 Compagnies d’ouvriers comportant du personnel
spécialisé, constituées au sein des 4 régiments d’artillerie à pied attachés
aux places fortes de Verdun (5e RAP),
Toul (6e RAP), Epinal (8e RAP) et Belfort (9e RAP). Il s’y ajoute la 10e batterie
territoriale du 12e régiment
d’artillerie de campagne de Vincennes, qui est chargée des voies de 60 du camp
retranché de Paris et qui compte 500 hommes. Ce sont d’ailleurs ces derniers
qui vont construire la première voie de 0,60 m du front, en Champagne en 1915
(5 km).
À l’automne 1914, dès la stabilisation du front, apparaît la nécessité
d’augmenter le potentiel de la voie de 0,60, tant en matériel qu’en personnel.
Sont alors déplacés vers le front les soldats des batteries du sud-est de la
France, que l’on forme rapidement et que l’on répartit en deux types d’unités :
batteries de construction (étude, tracé, pose et entretien) d’une part, et
batteries d’exploitation (conduite des trains, service des gares et dépôts)
d’autre part. On y adjoindra plus tard des batteries de réparation du matériel.
En 1917, le personnel est réorganisé. Les diverses batteries sont regroupées en
deux régiments d’artillerie à pied, le 68e RAP étant chargé de l’exploitation des voies,
et le 69e RAP de leur construction.
La locomotive Péchot-Bourdon est l’une des principales machines utilisées dans ce cadre. Elle est de type double Fairlie (020+020), avec un centre de gravité très bas. Cette machine comporte une chaudière double à foyer central, et donc deux cheminées, ce qui n'était pas pratique près du front : les artilleurs ennemis avaient une cible parfaitement localisée. Par contre, les avantages sont nombreux. Comme la chaudière repose sur deux trucks articulés à deux essieux chacun et comme ces derniers sont très faiblement écartés, l’empattement rigide est réduit au minimum. Cette disposition permet donc un passage facile dans les courbes de 20 m de rayon. Le mécanicien et le chauffeur prennent place de part et d’autre de la chaudière.
Un grand nombre de locomotives
Péchot-Bourdon ont été construites en France par les firmes Franco-Belge
(prototype), Fives Lille et Cail en 1890. En 1914, l'armée française dispose de
61 locomotives de type Péchot-Bourdon.
En 1914 et 1916, devant la nécessité
de disposer d'engins pour l'artillerie, le ministère de la Guerre passa
plusieurs commandes pour un total de 295 engins, réparties entre les firmes
Baldwin aux États-Unis (280 locomotives) et North British Locomotives de Glasgow
en Écosse (15 machines).
Du fait des différences de
systèmes d'unité de l'outillage de construction, les locomotives se révélèrent
particulièrement compliquées à entretenir, les pièces devant quasiment être
réalisées au cas par cas.
Au total, 356 engins auraient été
construits. À l'heure actuelle, seulement deux machines sont préservées à
l'étranger, une à Dresde et une autre en Serbie, ce qui peut s'expliquer étant
donné la particularité des machines, n'encourageant pas les industriels de
l'époque à s'en resservir.
Les personnels appartiennent aux
classes anciennes de la Territoriale ou de sa réserve : des hommes d’un certain
âge, de 40-45 ans, chargés de familles. Pendant le conflit, seuls les pères de
5 enfants sont renvoyés à l’arrière en 1916, puis les veufs avec 3 enfants en
1917 ; les autres restent au front. Ces unités, bien qu’étant exposées au feu
de l’artillerie adverse et aux accidents liés au transport d’explosifs, sont considérées
comme non combattantes. Elles n’obtiennent ce statut qu’en juin 1918, date à
laquelle elles totalisent plus de 20 000 hommes et plus de 300 officiers.
Un régiment comme le 69 RAP était en fait composé d’un grand nombre de batteries dont l’affectation pouvait changer d’un moment à l’autre, en fonction des besoins en construction ou entretien des voies ferrées. Nous ignorons à laquelle de ces batterie était affecté Clément-Paul Berthézène, nous ne pouvons donc pas le suivre précisément. Par ailleurs nous ne connaissons pas non plus la date à laquelle il a été retiré du service actif pour être hospitalisé à l’hôpital complémentaire 48 de Bourgoin (Isère), loin du front.
Il meurt le 7 avril 1918, de
maladie imputable au service, dans cet hôpital, installé dans l’ancienne usine
Trapadoux (ateliers de gravure et d’impression), 99 Grande rue de Jallieu, avec
400 lits.
Il figure sur le Monument aux
morts et sur le livre d’Or d’Anduze.
A suivre…